vendredi 23 août 2013

Au fil de la presse : piston dans les conseils généraux

Pour ceux et celles qui voudraient un peu plus de "biscuit" à se mettre sous la dent, je vous conseille entre autres, l'article paru dans le journal Sud Ouest du 6 février 2013.

Son titre : "Quand un fils de plombier succède à son père, on ne dit rien"

Quelques exemples dans la région Sud Ouest de ce qui se passe au niveau local ... entre copinage politique et liens familiaux, la charité bien ordonnée passe par le service public.


Une sollicitation pour débloquer la situation d'un administré en difficulté ? Le pain quotidien d'un élu local. D'autant que depuis les lois de décentralisation, les Conseils généraux sont souvent les plus gros employeurs des départements. Mais la bienveillance des élus viserait-elle aussi parfois leurs proches ?Un sondage - non exhaustif - au sein de quelques collectivités témoigne, en tout cas, de la profusion d'enfants, conjoints ou amis politiques d'élus parmi les employés. Piston ? Potentiel de persuasion de certains patronymes auprès des DRH ? Transmission génétique de l'intérêt pour la chose publique ? Ces trois explications ne sont pas toujours exclusives les unes des autres, mais aucune d'elles n'évacue la question de l'immixtion du politique dans la fonction publique, théoriquement astreinte à la neutralité.


À titre d'exemple, le sénateur président du Conseil général de la Gironde, Philippe Madrelle, semble avoir à cœur de consolider la dimension familiale de sa carrière. Il y a quelques mois, il a recruté au sein de son cabinet son fils, le conseiller régional Nicolas Madrelle. « Quand un fils de plombier succède à son père, on ne dit rien. Les postes de cabinet n'ont rien à voir avec des postes administratifs », s'agace le patron du Département, dont l'épouse Jacqueline est également son attachée parlementaire.

Il faut dire pourtant que Nicolas Madrelle n'était pas totalement en terrain inconnu dans les locaux du Département. Il a pu prendre un café avec sa demi-sœur, également employée. Ou, dans un autre service, avec la sœur de Jacqueline, elle aussi salariée du Conseil général.

Cette fibre pour la fonction publique territoriale, la famille du président Madrelle la partage avec celle de nombre de ses homologues (de gauche comme de droite). Comme dans un département voisin où les trois enfants de la compagne du sénateur président du Conseil général sont également employés par la collectivité. Parmi eux, le chauffeur… du président.

Ces ponts familiaux entre les sphères politique et administrative ne sont pas des cas isolés. En Gironde, selon notre enquête, au moins 6 des 15 vice-présidents du Conseil général ont un ou plusieurs enfants salariés dans la même collectivité.

Tel vice-président, par exemple, est au bureau comme à la maison. Sa compagne (déjà employée au Conseil général avant qu'ils se rencontrent) est maintenant en poste au cabinet de la présidence. Et les deux enfants de l'épouse ont trouvé un boulot au sein de la même institution. « Si les gens ont le concours, où est le problème ? Je n'ai jamais imposé quelqu'un de ma famille sans qu'il ait les compétences requises », martèle Philippe Madrelle.

Un bon observateur de la vie des collectivités est pourtant plus nuancé : « Tous les postes ne nécessitent pas le concours. On peut aussi entrer comme vacataire et le rester à vie, ou passer ensuite le concours interne, beaucoup plus facile. ».

« Il y a quinze ans, j'ai fait embaucher ma fille. Elle est compétente, mais si je ne l'avais pas recommandée, cela aurait sans doute été plus compliqué. Je ne vais pas me cacher derrière mon petit doigt », assume pour sa part le député du Blayais et conseiller général Philippe Plisson, compagnon de route de Philippe Madrelle. Et de poursuivre : « C'est vrai que, pendant longtemps, nous avons beaucoup embauché des personnes que nous connaissions, et même des maires. Mais c'était une autre époque. Maintenant, les choses sont différentes. D'autant que la reconnaissance est rarement proportionnelle à ce qu'elle devrait être. Beaucoup finissent par se croire tout permis, sous prétexte qu'ils ont été pistonnés. […] Un jour, j'ai fait embaucher un ami dans ma mairie et, trois ans plus tard, cet ''enfoiré''distribuait des tracts pour la liste adverse ! »

Philippe Madrelle se désole à son tour : « Les gens vous en veulent quand vous leur avez rendu service. Ceux qui font de la délation auprès des journalistes oublient que celui qui les a faits rois, c'est moi ! » L'ingratitude aurait-elle eu raison d'une pratique bien ancrée dans la vie publique ?

Reste que, parfois, une proximité politique ne peut pas nuire, même si l'on a des compétences. Après un passage à Solférino, à Paris, Renaud Lagrave avait été repéré par le patron du département des Landes,  Henri Emmanuelli. Quelques missions au Conseil général, puis au cabinet, lui ont permis de s'accoutumer aux rouages locaux avant de prendre la tête de la puissante Fédération PS, quelques années plus tard. Et pour le boulot ? Un poste de directeur à l'Agence landaise pour l'informatique (Alpi), un syndicat mixte présidé par… Henri Emmanuelli.

Quant à Bernard Cuartero, maire de Cambes (33) et chef de cabinet de Philippe Madrelle, ce titulaire de la fonction publique d'État, détaché au cabinet du Conseil général, s'est vu intégré par décret du président, administrateur hors classe en 2001. Soit le grade le plus élevé de la territoriale. Mais sans qu'aucune des conditions requises soit remplie. En 2008, la Cour des comptes s'était vivement émue de cette nomination. Le président du Département lui avait opposé une loi de « résorption de la précarité des fonctionnaires territoriaux ». Les magistrats financiers n'avaient pas été convaincus. Mais le chef de cabinet a gardé son fauteuil d'administrateur hors classe (indice salarial : entre 3 000 et 4 500 euros par mois).




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